[Poitou-Charente] Déca vs Bachtel

Rendu de Déca a écrit:Quand il sonda les regards, il ne trouva pas une once de compassion. Il était le monstre de ces gens, le diable du moment et il fallait exorciser la république balbutiante. Je n'aurais pas dû me laisser prendre mais voir la chute de mon père, c'était un délice dont je ne pus me priver. J'étais revenu par une nuit d'hiver, emmitouflé sous une ample houppelande de fourrures. J'avais toqué à la poterne et gueulé comme jamais. Je me figurais déjà la surprise de ce vieillard, sa colère aussi. Il perdait pied sur son trône qui avait toujours été trop grand pour lui et je n'y étais pas étranger. La disparition subite de son héritier à l'âge on ne peut plus féconder, comprenez que les intrigues vont bon train. Les gardes ne m'ont d'abord pas cru mais j'avais prévu le coup et par une meurtrière, je leur montrais ma chevalière après quoi, je fus enfin leur prince. Ils étaient tout émus de me revoir, me disaient-ils, empressés qu'ils étaient de gagner quelque faveur. C'était doux de retrouver son logis, mais bientôt risible. Quand on sortit le roi du lit, il voulut égorger tout le monde et puis il s'arrêta, sur le pallier de sa porte, dans sa grande chemise blanche, presque nu. Sous ses moustaches grisonnantes, sa grande mâchoire s'effondra. Il manqua se jeter dans mes bras mais un éclat surgit dans ses yeux et quand il s'approcha de moi, ce fut un crochet que je reçus pour seule embrassade. Ma vie de roublard avait aiguisé mes réflexes, je lui attrapai le poignet et j'allais pour lui rendre quand la reine sortit à son tour du lit, élégante jusqu'aux confins de la nuit. Elle ne fut jamais ma mère, du mois elle n'en donna jamais signe. Elle me rappelait cette autre femme qui m'avait bercé, néanmoins dans des lieux moins aisés, où l'hostilité à chaque coin de rue peut vous fourrer un canif dans la gueule et vous refaire un sourire. Une femme tout aussi dure, à l'épaule douce, au visage félin, aux lèvres généreuses, aux hanches onctueuses, au ventre suggestif. Elle non plus, je ne l'avais pas baisé, refroidi par le respect qu'elle dégageait, mon désir, bien qu'extrême, trébuchait. Elle s'appelait Elie, m'avait-elle murmuré après avoir tué trois hommes prêts à la violer. Elle aurait pu se défendre mais elle a voulu que je me batte pour elle. Je ne l'ai jamais comprise vraiment, moi, malgré tout ce qu'avait pu m'apprendre mes précepteurs, un prince n'est jamais prêt pour la fange. Ce jour-là, je venais voir mon père tomber dans la bourbe, le voir emprunter mon même cheminement, en plus bref évidemment. Il ne semblait pas souffrir de peur, sa fierté lui cachait la vérité, il n'avait jamais su lire la vérité de son peuple. Une nuit viendra où cent milles torches convergeront vers son palais et si fortifié soit-il, il tombera à moins que les gardes ne se mutinent avant. Le roi sera porté de prisons en prisons, toujours plus fangeuses, le mépris grandira et bientôt on le raccourcira. Oui, aujourd'hui, c'est mon tour, vous, les hommes, m'avez offert un beau spectacle. Le rideau tombe pour moi. Enfin.

Rendu de Bachtel a écrit:Mirza sortit doucement dans la rue, elle habitait dans un petit trou pratiqué dans les égouts, au milieu de ses amis. La ville était accessible directement par une trappe située dans le couloir.
Personne n'était dans la rue, elle s'empressa donc de monter sur les toits, à l'abri des gardes. Ceux-ci avaient déjà tenté plusieurs fois de tendre des pièges à leur petite bande. C'est ainsi que le petit Carac s'était fait chopé, et ils ne l'avaient plus jamais revu depuis ! Mirza s'accroupit sur une corniche, la ville s'étendant devant ses yeux, seulement éclairée par la lumière de la nuit. Elle adorait ce moment de la journée et cette vue magnifique. Malheureusement la nuit n'était pas un endroit sûr, malheureusement pour les autres car Mirza était devenue une enfant de la nuit durant ses années d'errance. Elle ne resta pas plusieurs minutes sur le toit comme elle en avait pris l'habitude dernièrement, pas question d'arriver en retard au rendez-vous avec la maître. Elle s'élança donc, bondissant de toits en toits tel un chat sauvage. Aucune tuile ne se délogeait sous son pied, aucun son ne trahissait sa présence. Elle courait, tous les sens en alerte, malgré sa rapidité elle avait déjà reçu certains coups de la part de propriétaires mécontents de son passage au-dessus de chez eux. Hors, dévaler un toit et tomber dans la rue ne faisait pas partie de ses priorités ce soir. Elle surveillait donc, ses yeux balayant son champ de vision, à la recherche du moindre danger. Mais ce n'est pas sur un danger qu'elle tomba, elle aperçut au loin une fenêtre de toit ouverte. Mirza s'approcha prudemment, et jeta un coup d'oeil à l'intérieur de la maison. Les propriétaires avaient laissé la fenêtre de leur chambre ouverte en cette chaude nuit d'été. Sans doute des nouveaux venus dans la ville, seuls ceux-ci osaient laisser leur fenêtre ouverte le soir. Mirza balaya toute la surface de la chambre de son regard perçant, à l'affût de la moindre bourse ou arme qui pourrait éventuellement lui servir. Elle vit tout de suite le coffret à bijoux situé sur la table de nuit, ainsi qu'une brique bizarrement remise dans le mur de la chambre. Elle décida qu'apporter un petit extra au maître des Susurreurs ne pourrait que lui être favorable. La jeune fille se glissa donc dans la chambre, sans aucun bruit. Le coffret à bijoux allait être facile à voler sans bruit, il ne disposait d'aucune protection. En revanche la bourse située derrière la brique allait plus poser problème. Mirza décida qu'elle allait voler le coffret dans un premier temps sans faire de bruit, puis elle s'occuperait de la brique. Sa vitesse allait lui permettre de fuir la chambre avant que le propriétaire se rende compte de quoi que ce soit.
Son plan marcha à la perfection, le pauvre bourgeois eut à peine le temps d'apercevoir le coin de sa cape. Mirza éclata de rire en attendant le gros imprudent hurler au vol derrière elle. Elle rigolait encore en arrivant devant le point de rendez-vous convenu. Deux gros malabars gardaient l'entrée d'une petite maison miteuse.
-Qu'est-ce qui te fait rire ? Lui demanda un des deux d'un ton peu amène.
-J'ai rendez-vous avec Le Gris, laisse-moi entrer. Les deux gardes éclatèrent d'un gros rire.
-Avec Le Gris ? Rien que ça ! Il s'en fout d'une fillette comme toi petite, allez dégage !
Mirza resta devant eux, les mains sur les hanches et l'air déterminé.
-T'as pas compris fillette ? Dégage on t'a dit !
Voyant qu'elle n'allait pas bouger, les deux gardes se renfrognèrent et firent jouer leurs muscles, espérant sans doute l'effrayer par ce geste. Cela n'eut pas l'effet escompté, Mirza leur sauta dessus, clouant la main du premier contre la porte avec son couteau de lancer et sauta sur le dos du deuxième. Avant qu'il ait pu se rendre compte de quoi que ce soit, le couteau de la jeune fille était appuyé sur sa gorge, faisant couler un léger filet de sang. Mirza se contracta, se préparant à la riposte qui n'allait sans doute pas tarder. C'est alors que retentit le bruit d'un applaudissement dans la ruelle. Une silhouette encapuchonnée fit son apparition derrière elle.